La vallée de Flåm

Lundi 4 juillet, réveillé par le klaxon du premier train qui sort du tunnel, puis par une surprise inattendue : le soleil qui pointe son nez à 8h30 et tape violemment sur la toile de tente ; pourtant je suis au fond d'une vallée assez encaissée. Si le temps reste comme ça toute la journée je vais pouvoir enfin laver mes vêtements et les faire sécher. Je sors la tête de la tente pour regarder le second train passer ; il y en a un par heure environ dans chaque sens, et tous semblent complet.

Au moment de repartir je croise le facteur de la Flåm Valley, et j'imagine sa tournée qui doit consister à parcourir plus de 40km pour distribuer 50 lettres et quelques paquets.

Disney Flåm.

J'arrive à Flåm en même temps que le train de midi, et soudainement j'ai l'impression d'être arrivé à Disneyland. De très nombreuses boutiques de souvenirs, des bus, des bateaux, des camping-car, des restaurants, des hôtels... et un monde hallucinant. Je m'en vais à l'écart de la foule au bord de l'Aurlandfjord pour faire une pause sandwich.

Juste derrière moi il y a une taverne Viking qui brasse 17 bières différentes, je rentre pour en goûter quelques unes dans un décor que j'adore. Des canapés en cuir couverts de peau d'animaux, des bancs, tables et fauteuils en bois massif, un bar et une cheminée au centre, le tout en pierre et en bois, avec de bonnes musiques en fond sonore. Le seul truc qui me dérange, c'est ce flux de touristes qui rentrent pour prendre des photos, avec leurs énormes valises en faisant un vacarme, et repartent sans rien consommer. Laissez nous boire nos godets en paix et retournez dans votre train bordel !! On dirait le public d'un parc d'attraction qui va à un concert d'Amon Amarth.

Après plusieurs heures de dégustation et de nombreux passages aux toilettes, je ressors, un peu ivre, et vais me placer au bord de la route principale pour tendre le pouce. A peine les mains sorties des poches, je me retourne et vois une voiture qui s'arrête ; c'est le jeune norvégien qui m'avait pris la semaine dernière dans son camping-car de Røldal à Odda. "Encore toi !" dit-il. Si on s'était donné rendez-vous on n'aurait pas fait mieux niveau timing. Il m'emmène 17km plus loin, dont 16km de tunnel, jusqu'à Gudvangen. Il me raconte que lorsqu'il m'avait déposé au pied du Trolltunga, juste après il avait embarqué les 2 tchèques que j'avais rencontré à Sand. Le monde est petit.

Un drakkar au bord du Nærøyfjord.

Je m'assois sur un banc face au Nærøyfjord, un des plus beaux fjords de Norvège, classé au patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco. Je glande un moment, ma principale activité lorsque j'arrive dans un nouvel endroit. Je regarde un ferry partir, et me rend compte que c'est celui que j'aurais dû prendre. D'un autre côté, je viens juste d'arriver et le coin est superbe, ça serait dommage d'en repartir aussi vite. En plus demain il devrait faire encore plus beau qu'aujourd'hui, ça sera l'idéal pour faire une croisière sur ce fjord. Il est extrêmement étroit, se faufilant entre des parois abruptes d'où tombent de vertigineuses chutes dont l'eau se vaporise avant d'avoir atteint le bas.

Chutes de pierres.

Je m'engage sur une ancienne route désertée qui longe la côte, remplacée désormais par un tunnel, pour chercher un lieu à l'écart des touristes afin de passer la nuit. Mais dans un endroit pareil c'est quasiment impossible de trouver du plat où il est possible de planter des sardines. En plus vu le nombre de caillou qui envahissent la route, ce n'est pas rassurant de dormir sous ces falaises. Mais je continue de marcher car je sens qu'un endroit idéal ne va pas tarder à se montrer. En effet, après 2km j'aperçois un gros rocher dans l'eau au bord du fjord, dont le dessus couvert d'herbe semble plat et adapté tout juste à la taille de ma tente. L'endroit est assez improbable pour dormir mais tellement parfait. Quand je pense à tous ces gens qui payent une fortune pour dormir à l'hôtel, alors qu'il y a des endroits comme ça, où l'on peut dormir les pieds quasiment baignants dans un des plus beaux fjords au monde. Je regarde au dessus de moi ces rochers en me demandant lequel pourrait se décrocher cette nuit pour me fracasser gentiment la gueule, puis je m'endors.

Campement sur un rocher près de Gudvangen.